La polyarthrite rhumatoïde en questions
La polyarthrite rhumatoïde est le plus fréquent des rhumatismes inflammatoires chroniques. Une étude en cours vise à préciser le risque pour un individu donné de développer cette maladie. Les explications du Dr Axel Finkh, rhumatologue et chercheur aux HUG.
Par Patricia Bernheim
Qu’est-ce que la polyarthrite rhumatoïde ?
La polyarthrite rhumatoïde (PR) est une maladie d’origine immunologique (auto-immune) qui débute par une activation anormale du système immunitaire, le plus souvent entre 30 et 60 ans. C’est une maladie « chronique » qui évolue par poussées de plusieurs jours à plusieurs mois, tout au long de la vie. Le début est généralement indolore. Cette phase asymptomatique dure des mois ou des années, avant que les premiers symptômes n’apparaissent.
Sur quoi repose le diagnostic ?
Il est souvent difficile à poser au début et est du ressort d’un rhumatologue. La maladie atteint plusieurs articulations (poly- pour plusieurs, arthr- pour articulations, -ite pour inflammation). Les mains et les pieds sont souvent touchés, mais presque toutes les articulations peuvent être atteintes au cours de l’évolution de la maladie. Celle-ci se manifeste par des douleurs et des gonflements survenant sans raison particulière, notamment le matin au réveil, traduisant une inflammation des articulations.
Qui touche-t-elle ?
Elle concerne environ 70 000 personnes en Suisse, soit entre 0,5 et 1% de la population adulte, trois fois plus souvent les femmes que les hommes. Ainsi, un adulte sur dix a dans sa famille une personne atteinte de PR, parfois sans le savoir.
Quelles en sont les causes ?
Elles ne sont pas encore totalement comprises. On sait qu’il existe une composante génétique favorisant sa survenue. Dans l’entourage familial proche d’une personne atteinte, le risque de développer la PR est multiplié par 5 pour un homme et par 15 pour une femme. Ainsi, le risque de développer la maladie au cours de la vie est d’environ 2% pour le fils d’une personne atteinte, 6% pour la fille et 12% pour la sœur vraie jumelle d’une femme atteinte. Plusieurs facteurs environnementaux jouent également un rôle en renforçant la prédisposition génétique. (lire encadré)
Comment se soigne-t-elle ?
Le traitement de l’inflammation repose sur les anti-inflammatoires et les dérivés de la cortisone. Les traitements de fond, parmi lesquels figurent les « biothérapies » (p.ex. les « anti-TNF »), permettent d’éviter les destructions articulaires dans la majorité des cas.
Peut-on la prévenir ?
Des études sur des phases très précoces ont montré qu’à ce stade, il était possible de modifier de façon permanente l’évolution de la maladie, voire même d’obtenir une guérison. Poser précocement le diagnostic de polyarthrite rhumatoïde ou identifier les phases pré-symptomatiques de la maladie est donc devenu un enjeu important. L’existence de marqueurs biologiques de la polyarthrite rhumatoïde pré-symptomatique suggère qu’il est aujourd’hui possible de préciser le risque pour un individu donné de développer cette maladie à l’aide d’une prise de sang, de tests génétiques et sérologiques spécifiques. Une étude de dépistage des phases précoces de la polyarthrite est d’ailleurs en cours en Suisse et les HUG sont toujours à la recherche de personnes ayant un lien de parenté avec un patient souffrant de PR. (lire encadré)
Les facteurs environnementaux
La prédisposition héréditaire de la PR peut être renforcée par différents facteurs environnementaux. Ainsi, fumer est le facteur de risque le plus important, surtout chez des personnes ayant déjà un facteur de risque génétique. Si ce marqueur est détecté dans le sang, fumer augmente de plus de 20 fois le risque de développer la maladie.
D’autres polluants inhalés semblent également jouer un rôle. Selon une étude américaine, vivre à moins de 50 m. d’une autoroute augmenterait le risque de PR d’environ 30%. Travailler dans un milieu exposé aux poussières de silice augmente également le risque d’environ 70%.
Il existerait aussi une association entre des facteurs hormonaux et la survenue de PR. Si les femmes ont allaité pendant plus de 24 mois au total, le risque de PR semble être réduit de 50%. Il augmente en revanche chez les femmes ayant eu des règles précocement ou souffrant de cycles menstruels irréguliers.
Des études récentes suggèrent qu’une consommation modérée d’alcool (un jour sur trois) peut protéger contre le développement d’une PR. Une consommation régulière et importante de fruits et de légumes de la famille des crucifères (choux…) semble protectrice, mais reste à confirmer. Un éventuel rôle des antioxydants, des vitamines et d’autres micronutriments élémentaires n’est pas démontré à ce jour.
Enfin, l’attention s’est récemment focalisée sur les bactéries pathogènes causant des maladies des gencives. Globalement, ces études suggèrent qu’une infection par P. gingivalis chez des patients génétiquement prédisposés peut induire des phénomènes immunologiques qui favorisent la survenue d’une PR.
Participer à la recherche
Dans le cadre d’une étude clinique de dépistage précoce de la polyarthrite rhumatoïde conduite dans les services de rhumatologie de la plupart des grands hôpitaux suisses, les HUG recherchent des femmes entre 18 et 75 ans ayant un lien de parenté avec un patient (frère ou sœur, parent ou enfant) souffrant de polyarthrite rhumatoïde.
Etant établi que l’hérédité joue un rôle prépondérant dans le développement de cette maladie, cette étude vise à évaluer si un dépistage permet de détecter des formes précoces de polyarthrite rhumatoïde dans la famille de patients souffrant de cette maladie. Aujourd’hui, il est en effet possible d’estimer le risque individuel de développer cette maladie à l’aide de tests génétiques et immunologiques sur une prise de sang.
La participation comporte un questionnaire et une prise de sang. Les résultats des tests sont transmis ultérieurement, accompagnés de quelques explications. Toutes les informations personnelles sont traitées confidentiellement.
Pour en savoir plus
arthritis-checkup@hcuge.ch
www.arthritis-checkup.ch
HUG - Genève,
Avenue Beau-Séjour 26 / 1211 Genève 14
Tél. 022 382 36 97