Les vertus des probiotiques
Si vous mangez des yaourts, vous consommez, peut-être sans le savoir, des probiotiques. Ces micro-organismes ont de multiples vertus, dont celles de renforcer notre système immunitaire. Petit tour d’horizon.
Par Patricia Bernheim
Qu’est-ce que les probiotiques?
Ces micro-organismes sont des bactéries vivantes, présentes naturellement dans les produits fermentés (lait, yaourts, choucroute). Elles peuvent aussi être soigneusement sélectionnées, puis ajoutées dans l’alimentation en fonction de leur vertu pour notre santé.
Tous les micro-organismes ne sont pas pour autant des probiotiques. Pour mériter ce «label», il faut qu’ils aient fait la preuve de leur apport bénéfique pour la santé, qu’ils soient en concentration suffisante et qu’ils survivent à l’acidité de l’estomac pour pouvoir agir dans l’intestin.
A quoi servent les probiotiques?
Metchnikoff, Prix Nobel en 1908, a découvert que l’intérêt nutritionnel des yaourts résultait en grande partie de la présence de bactéries lactiques, ce terme ne signifiant pas qu’elles sont présentes dans le lait, mais qu’elles synthétisent de l’acide lactique. Depuis sa découverte, un grand nombre d’études ont montré les innombrables vertus de certaines souches de ces bactéries: amélioration de la digestibilité des protéines et du lactose, de la biodisponibilité des minéraux et participation à la synthèse de certaines vitamines, en particulier la vitamine B et la vitamine K.
Pour l’heure, on peut affirmer que certaines souches de probiotiques ont une action de régulation sur le transit intestinal et peuvent donc se révéler utiles, aussi bien en cas de diarrhée que de constipation. D’autres sont efficaces contre les allergies ou agissent contre les gastro-entérites. D’autres, enfin, permettent de diminuer les récidives inflammatoires dans la maladie de Crohn, inflammation chronique de la partie terminale de l’intestin grêle et souvent du colon. Par ailleurs, de plus en plus d’études confirment une amélioration du système immunitaire, dans le sens d’une augmentation de la résistance aux maladies immunitaires, grâce à l’absorption orale de probiotiques. Enfin, d’autres bénéfices sont pour l’instant à l’étude, notamment ceux du lactobacille contre l’eczéma atopique ou dans certains types de cancers.
Mais les probiotiques sont un sujet complexe. Ils n’ont pas encore révélé tous leurs secrets aux microbiologistes. On ne peut donc pas extrapoler l’action d’un probiotique à tous les probiotiques. Une meilleure connaissance de l’action des différentes souches permettra une sélection plus spécifique en fonction des différentes pathologies.
A quel niveau agissent-ils?
Pour bien comprendre leur rôle, il faut faire un petit détour par nos intestins, puisque c’est à leur niveau que tout se joue. Notre tube digestif héberge en effet plusieurs centaines de milliards de bactéries, de 600 espèces différentes, qui composent la flore intestinale. Par la sécrétion d’enzymes, elles facilitent la digestion, mais elles ont aussi un rôle clé dans le système de défense de l’organisme contre les agressions extérieures.
Cette foule de micro-organismes est fermement ancrée dans les plis et les replis de nos intestins. Lorsque tout va bien, c’est-à-dire lorsque la flore est équilibrée, elle ne laisse aucune chance aux bactéries qui arrivent par l’alimentation de s’installer et de proliférer. En outre, elle synthétise des substances capables de stimuler tout le système immunitaire. La flore intestinale est donc garante du bon fonctionnement de l’intestin et tient une place privilégiée dans le maintien de la santé.
Mais, si rien ne peut la faire disparaître, la flore intestinale peut en revanche être déséquilibrée par la prise d’antibiotiques, par une mauvaise alimentation, par le stress, des vaccins, des déficits immunitaires ou des maladies métaboliques. Ce déséquilibre de l’écosystème intestinal va alors entraîner une perturbation de la tolérance à un ou plusieurs aliments, ainsi que l’installation d’une inflammation digestive.
Une flore intestinale déséquilibrée peut avoir plusieurs conséquences: locales, par exemple des ballonnements, des flatulences, des douleurs, des irrégularités du transit. Mais les retombées peuvent aussi prendre la forme de symptômes au niveau de la peau, des muqueuses ou des articulations. A ces symptômes physiques, on peut également ajouter des symptômes psychiques.
En rééquilibrant de manière simple et efficace la flore intestinale, les probiotiques jouent donc un rôle important dans le maintien de la santé.
Où les trouve-t-on?
Les yaourts, ou tout autre produit fermenté, sont la source première de probiotiques. Depuis quelques années, certains yaourts contiennent en plus plusieurs souches de bactéries, sélectionnées en fonction de leur action. On les trouve aussi sous forme de compléments alimentaires, de poudres à diluer dans un verre d’eau ou de gélules.
A qui sont-ils destinés?
Tout le monde peut bénéficier de leurs vertus. Les bébés, notamment, sont parmi les grands bénéficiaires des probiotiques. Plusieurs études ont démontré que l’ajout de certains d’entre eux dans le lait pour nourrisson permettait de limiter les risques de diarrhée. D’autres études ont démontré que certaines de ces bactéries amélioraient la réaction immunitaire et permettaient donc une meilleure réponse aux vaccins.
Les probiotiques sont-ils la panacée?
Très intéressants sur le plan nutritionnel, les probiotiques ne suffisent pas à eux seuls à assurer une bonne santé. Ainsi, d’une part, ils ne remplacent pas les traitements habituellement utilisés pour tel ou tel trouble intestinal et, d’autre part, il est inutile de faire une cure intensive de yaourts si le reste de l’alimentation est déséquilibré! La règle d’or pour conserver une bonne santé reste donc de manger varié, équilibré, et de pratiquer un exercice physique.
Quatre questions au docteur Gérald Langel, micronutritionniste à Genève
Les probiotiques sont-ils des médicaments?
Selon la législation suisse, si aucune allégation thérapeutique n’est faite sur l’emballage, ils sont considérés comme des compléments alimentaires, au même titre que les vitamines ou les oligoéléments. S’ils sont commercialisés pour le traitement de la diarrhée, par exemple, ils devront être enregistrés comme médicaments.
En pratique, le même probiotique peut être utilisé pour son action préventive, comme son action stimulante du système immunitaire, ou pour son action curative.
Les prendre sans avis médical, cela représente-t-il un danger?
Sous forme de compléments alimentaires, ils sont en vente libre, car ils n’ont pas d’effets secondaires. L’automédication, quels que soient les produits utilisés, représente cependant toujours le même danger: l’absence de diagnostic précis.
Prendre des probiotiques lors d’une diarrhée ne représente aucun danger à condition de consulter si le symptôme perdure. Dans certains cas, le dosage, qui peut être différent selon les indications, nécessite également l’aide d’un professionnel de la santé afin d’obtenir de meilleurs résultats.
Quelles sont les situations les plus courantes pour lesquelles vous recommandez des probiotiques?
Outre tous les symptômes digestifs (constipation, diarrhée, ballonnements, flatulence), je les recommande lors d’infections à répétition. Ils sont particulièrement utiles chez les femmes souffrant de cystites ou d’infections vaginales fréquentes.
Les allergies et les intolérances alimentaires sont des domaines où l’équilibre de la flore intestinale est bien entendu très important. Enfin, il ne faut pas oublier les sportifs qui ont, pour diverses raisons, une flore particulièrement fragile.
Est-il utile de les prendre de manière préventive, en même temps qu’un traitement aux antibiotiques?
Oui, mais il serait encore mieux d’en prendre avant. En effet, comme déjà dit, une flore intestinale équilibrée diminue le risque de développer une infection. Pour se protéger, il est donc utile d’avoir, en tout temps, la meilleure flore intestinale possible.
Il faut donc prendre des probiotiques chaque fois que l’équilibre de la flore est mis en danger. La prise d’antibiotiques est l’une de ces situations, une modification des habitudes alimentaires lors d’un voyage, surtout si celui-ci a lieu dans des conditions sanitaires précaires, en est une autre.